Le jeudi 13 janvier, le personnel de l’Éducation Nationale et les lycéens et lycéennes se mobilisent contre la situation catastrophique à l’école en pleine vague Omicron. Les écoles manquent de personnel, il n’y a pas de tests pour les élèves et les protocoles sanitaires sont décidés de manière opaque et sans tenir compte des besoins des enseignants et des élèves. Une grève inédite pour dénoncer la gestion sanitaire du gouvernement, le manque de moyens structurel et la casse du service public.
Le matin même, plusieurs lycées étaient bloqués par les lycéens en protestation de la politique de Blanquer (ministre de l’Éducation nationale) depuis la rentrée du 3 janvier. Comme à son habitude, le gouvernement répond par la répression à la colère des jeunes. Le dispositif policier pour casser les blocus est impressionnant. Particulièrement à Paris, la police violente les lycéens/lycéennes. À Nantes, la police a même foncé sur la foule de lycéens/nes devant un lycée. Un niveau de répression systématique de la part du gouvernement, qui rappelle en effet les violences policières subies par les lycéens/nes à l’automne 2020 lorsque ceux-ci se mobilisaient pour des protocoles sanitaires décents.
Cette grève inédite par les taux de mobilisation et les secteurs impliqués, à déstabilisé non seulement Jean-Michel Blanquer mais aussi Emmanuel Macron, qui profitait jusqu’ici de la crise sanitaire pour se positionner au-dessus de la mêlée en vue de l’élection présidentielle de 2022. À 90 jours du 1er tour des présidentielles, Macron, pas encore officiellement candidat craint que la colère s’étende et tente de lâcher des miettes pour éviter que la mobilisation dans les écoles fasse tache d’huile.
Ce jeudi appelé le “jeudi noir“ par la presse bourgeoise témoigne d’une colère profonde de la part des travailleurs/euses de l’Éducation Nationale, révélée par la gestion de l’épidémie par le gouvernement. Au-delà du scandale des protocoles, c’est le manque de moyens structurel dans les écoles que dénoncent massivement les enseignant.es et le personnel. Une colère qui pourrait se généraliser à d’autres secteurs qui ont fait les frais des mêmes politiques. De quoi inquiéter le gouvernement qui, tout en maintenant sa ligne autoritaire et pro-Medef (organisation chargée de défendre l’intérêt du patronat), tente d’apaiser la situation avec les annonces de Blanquer pour la plupart déjà prévues comme la distribution de 5 millions de masques FFP2 à certains personnels, l’embauche de 1500 assistant d’éducation et l’arrivée de masques chirurgicaux.
Ce ministre modèle et indéboulonnable depuis 2017 du macronisme, à la tête de la réforme du Bac et des politiques néo-libérales et réactionnaires pour l’école, Blanquer incarne désormais pour le personnel de l’Éducation la stratégie criminielle et pro-Medef du gouvernement. Au point que c’est Jean Castex qui a dû annoncer publiquement l’élaboration du 50eme protocole sanitaire dans les écoles cette semaine. Mais les mesures restent dérisoires. Le gouvernement est maintenant sous la crainte que la mobilisation continue et se cristallise dans les semaines à venir. D’abord parce que si la situation sanitaire est un déclencheur, la colère vise l’ensemble du projet de Macron et de Blanquer pour l’école. Ensuite, parce que cette colère pourrait être encore intensifiée par l’aggravation de la pandémie, avec une augmentation des contaminations, des hospitalisations et une saturation des hôpitaux.
Et en Allemagne aussi, la politique offre suffisamment de raisons pour faire comme les enseignants et les élèves français. Après chaque vacances, on ne sait pas, jusqu’à la veille de la rentrée, si l’école se déroulera en présentiel ou non. Il y a un va-et-vient constant entre les cours en présentiel, en alternance ou en ligne. Actuellement, l’école se déroule en grande partie en présentiel et bien que seulement la moitié environ des 12-17 ans soit complètement vaccinée (chez les 5-11 ans, seulment 12% sont vaccinés), les « mesures de protection » sont, comme en France, toujours les mêmes qu’au début de la pandémie : aérer et porter un masque. Aucune trace de filtres à air ou d’autres mesures de protection. Au lieu de dépenser quelques millions d’euros pour aider les élèves en crise à apprendre et à se protéger contre le virus, des milliards vont au capital.
En France, jusqu’ici la crise sanitaire semblait plutôt profiter à Macron, et la vague Omicron avait même permis d’éclipser tout opposition qui tentait alors de jouer des coudes pour exister dans une séquence polarisée par le sanitaire. Le risque d’une mobilisation par en bas plus large se fait jour, et avec lui le danger de balayer ses prétentions pour 2022 alors que de plus en plus de français et françaises ne font plus du tout confiance à Macron. Cette situation indique les tâches du mouvement, et de tous ceux qui veulent en finir avec le gouvernement et sa politique. À l’heure où les directions syndicales négocient des miettes avec le gouvernement pour une sortie de crise, il faut travailler à l’extension de la mobilisation en développant l’auto-organisation dans les établissements, pour non seulement mettre en place des protocoles sanitaires d’urgence mais aussi construire le rapport de force nécessaire pour arracher les moyens suffisants pour étudier et enseigner dignement. Alors que le personnel de l’Éducation Nationale a été au cœur des dernières mobilisations, il faut imposer un plan de bataille qui permette d’entraîner les autres secteurs, pour construire un mouvement de l’ensemble du monde du travail en défense des services publics, contre la politique pro-patronale du gouvernement, et pour refuser de payer la crise sanitaire et économique.